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MOHAMMED À MÉDINE
13, 15). Paul surenchérit : « Ceux-ci [les juifs] ont mis à mort le
S-eigneur Jésus et les prophètes, et ils nous ont persécutés. Ils
déplaisent à D-ieu et sont ennemis de tous les hommes. Ils veulent
nous empêcher d’annoncer aux autres peuples le message qui peut les
sauver. Ils complètent ainsi la série de péchés qu’ils ont commis
dans tous les temps. Mais la colère de D-ieu les a finalement
atteints » (Thessaloniciens I 2, 15-16).
L’opinion du judaïsme à l’égard des non-juifs et de la
conversion
Pour les apôtres et pour Mohammed, le manque d’enthousiasme des
juifs à convertir les païens est l’expression de la haine et de la
jalousie qu’ils portent aux autres nations ; ils auraient voulu
garder l’exclusivité sur le Paradis. Pourtant, dans les textes de
la tradition juive, on ne trouve nulle part l’expression d’une
haine ou de la jalousie à l’égard d’autres nations. Bien au
contraire, l’espérance eschatologique juive est universaliste.
Leurs prophètes affirment de façon récurrente que toutes les
nations vivront en paix dans le respect de la volonté divine.
Les juifs finissent leurs trois prières quotidiennes par cette
supplique : « C’est pourquoi nous espérons en Toi, notre D-ieu […],
et tous les êtres humains acclameront Ton Nom […], tous les peuples
de l’univers plieront le genou devant Toi […], et tous accepteront
le joug de Ta royauté et Tu régneras sur eux, prochainement et
éternellement […] ».
Selon le Pentateuque, l’humanité tout entière était, longtemps
avant le don de la Torah aux juifs, astreinte aux lois divines : D-
ieu condamna Caïn pour le meurtre de son frère, une génération
perverse a été anéantie par le Déluge, Sodome et Gomorrhe furent
détruits pour leur iniquité et leur immoralité. Pour la tradition
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juive, les sept lois noachides et leurs compléments , – le Coran se
plaît à les nommer à juste titre les lois d’Abraham – ont été
ordonnées par D-ieu au premier homme. Ne les ayant pas respectées,
ce dernier a été chassé avec les siens du Paradis. Pour y accéder,
il n’est pas indispensable d’être juif, que ce soit de naissance ou
par conversion. Il suffit de respecter ces lois . Le non-juif qui
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les étudie et les respecte est considéré comme le Cohen-gadol, le
grand Prêtre : « Rabbi Méir dit : D’où sais-je que le non-juif qui
pratique les lois divines [les sept lois de Noé] est considéré
comme le grand Prêtre ? Car la Torah déclare : Vous observerez
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donc Mes lois et Mes statuts, parce que l’homme qui les pratique
obtient, par eux, la vie [éternelle] ; Je suis l’É-ternel » (Talmud
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Sanhédrin 59 A). Le Talmud affirme : « Balaam n’a pas part au
monde futur, mais les non-juifs qui respectent ce que D-ieu attend
d’eux y auront part » (Sanhédrin 105 A).
On peut néanmoins s’interroger sur le fait que les juifs
n’encouragent pas les non-juifs à embrasser le judaïsme ; ils les
186 Les sept lois noachides tirent leur nom de Noé, à qui elles furent redonnées ;
elles représentent la majorité des lois morales de la Torah (Talmud Sanhédrin 59
A et 74 B), voir le commentaire, Bet ha-behira, de Rabbi Ménahem ben Salomon
Meïri de Montpellier (1249-1316),
187 Talmud Sanhédrin 105 A ; Maïmonide, Yad Hazaqah/Rois 8, 10-11.
188 Lévitique 18, 5.
189 Le « prophète des nations » qui tenta de maudire les juifs et s’adonna à
d’autres forfaits (Nombres 22-23).
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