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MOHAMMED À MÉDINE

retournèrent et cessèrent de faire route avec lui » (Jean 6, 30-
66).
Les juifs demandèrent à Jésus : « Qui peut témoigner de ta
prophétie ? Il répondit : moi et mon divin père en sommes les
témoins. Ils lui dirent : L’homme ne peut témoigner sur lui-même et
où est ton père ? Il leur répondit : vous ne Le connaissez pas »
(Jean 8, 17-19).
Le Talmud pour sa part affirme que Jésus blasphémait, qu’il
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s’égarait au point d’être en contradiction avec le monothéisme .
Nous n’insisterons pas sur ce point ; les polémiques entre
chrétiens et juifs à ce sujet n’interfèrent en rien dans les
controverses entre juifs et musulmans

Paul de Tarse

Certaines doctrines du Coran ayant pour origine les déclarations
de Paul, nous ne pouvons faire l’impasse sur ce dernier. Juif du
nom de Saül de Tarse, il aurait été disciple de Rabbi Gamaliel, un
vénéré maître pharisien. À ses début, Paul s’oppose aux chrétiens.
Il les traite d’hérétiques, comme le font les juifs fidèles à la
Torah : « Je suis juif, né à Tarse en Cilicie, mais j’ai été élevé
ici, dans cette ville [Jérusalem], et j’y ai été instruit aux pieds
de Gamaliel dans l’observance stricte de la Loi de nos pères, ayant
pour D-ieu le même zèle que vous avez tous aujourd’hui. C’est moi
qui ai persécuté jusqu’à la mort cette secte [les adeptes du
Christ] » (Actes 22, 3-4). Peut-être ne faut-il voir dans cette
déclaration que le désir de noircir son passé pour mieux glorifier
sa conversion.
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Ayant eu une révélation sur le chemin de Damas , il devient du
jour au lendemain un des plus fervent zélateurs de Jésus. Il rédige
de nombreuses lettres ou Épitres, et interprète la Bible à sa
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façon. Il instaure au nom du Christ une nouvelle religion et œuvre
à sa diffusion à travers l’Empire romain.
Conscient que les lois juives seraient dures à respecter pour
les païens, Paul les aménage à leur intention. Les Sages d’Israël
affirmant « lorsqu’un homme est mort, il est exempté des
commandements » , Paul déclare que Jésus en fut affranchi à sa
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mort. À sa résurrection, Jésus n’étant plus sous la loi de la
Torah, tous ceux qui croient au D-ieu mort puis ressuscité, se
trouvent de fait affranchis. Le respect des commandements serait
devenu caduc, voire facultatif (Romains 7).




162 Talmud Sanhédrin 107 B et 43 A, édition non censurée.
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Pour le Coran, Jésus n’est jamais en contradiction avec le monothéisme pur ;
il suit l’Évangile des Ébionites. Les Ébionites étaient une secte judéo-
er
chrétienne du I siècle, ils ne voyaient en Jésus qu’un prophète. Voir Joseph
Azzi, Le Prêtre et le Prophète, Paris, Maisonneuve et Larose, 2001. Il se peut
aussi que Mohammed ait été influencé par l’arianisme, secte chrétienne née à
e
Alexandrie au IV siècle, qui considérait elle aussi Jésus comme un prophète.
164 Curieusement, ça n’est pas la première fois dans l’histoire juive que Damas
est la ville où un disciple de la plus grande sommité rabbinique devient le plus
grand hérétique ; Géhazi, élève du prophète Élisée, y avait précédé Saül de
Tarse, Talmud Sanhédrin 107 B et voir aussi Midrach Rabbah/Genèse 14, 15.
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Paul s’appuie sur un certain Ménahem (Actes 13, 1) ; celui-ci est sans doute
le même personnage que le Ménahem cité par le Talmud, Haguigah 16 B et Yérusalmi
Haguigah, chapitre 2.
166 Talmud Chabbat 30 B.


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