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MOHAMMED À LA MECQUE
textes qui furent écrits sur des supports de fortune, comme le
rapporte la tradition. Ils relatent l’éducation de Mohammed, les
confrontations avec ses auditeurs, ses exhortations et certains
événements de sa vie. Si le style allusif et approximatif est
compréhensible pour le rédacteur, à l’instar d’un carnet de bord ou
d’un journal intime, il est obscur pour le lecteur. Ces textes
furent probablement rédigés par une ou deux personnes. La première
a sûrement été le fameux Waraqa, l’oncle de Mohammed.
Après que le calife ‘Uthmân se fit remettre l’ensemble des
textes, il fit transcrire des passages du premier livre – la Torah
en arabe, que Mohammed appelait le Coran et qu’il disait descendu
du ciel – avant d’en dissimuler les manuscrits ou de les détruire.
Ensuite, il agrégea ces passages du premier livre au carnet de
bord. De là provient la difficulté pour le lecteur de trouver une
cohérence à ce livre qui sera appelé le Coran Moushaf ‘Uthmân et
que Mohammed n’a évidemment pas connu.
Le maître
Selon le Coran Moushaf ‘Uthmân, Mohammed reçut le Coran d’un
sage : « Certes, c’est toi qui reçois le Coran, de la part d’un
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sage, d’un savant » . Sachant que Mohammed emploie le mot Coran
pour désigner la Torah et que seuls les juifs et certains chrétiens
la connaissaient alors, il est légitime de penser que ce sage qui
l’instruisit était soit un rabbin soit un missionnaire chrétien ;
un idéaliste passionné dans tous les cas. Nous penchons pour
l’hypothèse qu’il eut deux maîtres : à La Mecque un rabbin, puis à
Médine un chrétien. Le premier fera transcrire ce que Mohammed
appelle le Coran en arabe, et rédigea pour le moins la première
partie du carnet de bord. Il instruisit Mohammed dans la Torah,
l’incita à exhorter les Arabes mecquois à l’adopter et lui enseigna
l’art de débattre avec eux.
Nous tenterons de reconstituer la vie de Mohammed, à partir de
passages épars du Coran et de quelques bribes de la tradition.
Selon la tradition déjà citée, orphelin très jeune et confié à
une nourrice, Mohammed s’enfuit de chez elle pour être recueilli
par Waraqa Ibn Naufal. Nous pouvons en effet supposer par la
lecture du Coran que Mohammed passa son enfance auprès de ce sage :
« Ne t’a-t-Il pas trouvé orphelin ? Alors Il t’a accueilli. Ne t’a-
t-Il pas trouvé égaré ? Alors Il t’a guidé » (93, 6-7). Comme nous
l’avons déjà relaté, ce sage lui trouva une riche épouse en la
personne de l’une de ses cousines : « Ne t’a-t-Il pas trouvé pauvre
? Alors Il t’a enrichi » (93, 8).
Mohammed vaque durant la journée à ses occupations. À la tombée
du jour, il se rend chez son maître ; jusqu’à minuit, voire plus
tard, il étudie avec lui le Coran : « Ô toi, l’enveloppé [avec un
manteau], lève-toi, toute la nuit, exceptée une petite partie, sa
moitié ou un peu moins ou un peu plus, et récite le Coran,
lentement et clairement. Nous allons te révéler des paroles lourdes
[importantes]. La prière pendant la nuit est plus efficace et plus
propice pour la récitation . Tu as dans la journée à vaquer à de
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longues occupations » (73, 1-7). Il devait se présenter chez son
maître vêtu d’un manteau : « Ô toi, le revêtu d’un manteau » (74,
66 Coran 27, 6. Pour les musulmans, le sage dont il est question dans ce verset
serait l’ange Gabriel, et le Coran cité est le Coran Moushaf ‘Uthmân.
67 Citation du Talmud, Avodah Zarah 3 B, Midrach Rabbah/Chir Hachirim, 5, 11.
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