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NAISSANCE DE L’ISLAM COMME RELIGION INDÉPENDANTE

te donnera un fils, et tu lui donnera pour nom Isaac, et
J’érigerait avec lui Mon Alliance, comme Alliance éternelle, pour
sa descendance après lui » (Genèse 17, 19).
Ce pacte fut conclu grâce à l’acceptation des préceptes
supplémentaires, dont il est question dans le verset où D-ieu
promit la Terre sainte à Isaac : « Habite cette terre-là [Canaan],
et Je serai avec toi, et Je te bénirai. Car Je donnerai à toi et ta
postérité toutes ces provinces, accomplissant ainsi le serment que
J’ai fait à ton père Abraham […] ; et en ta descendance seront
bénis tous les peuples de la terre. Car Abraham a écouté Ma voix et
il a suivi Mes directives, exécutant Mes préceptes, Mes lois et Mes
doctrines » (Genèse 26, 3-5).
Ces directives, préceptes, lois et doctrines sont pour la
tradition juive celles qui sont recommandées aux juifs, elles
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figurent dans le Pentateuque ou sont transmises oralement. Elles
sont l’essence même du judaïsme.

Œil pour œil
Mohammed prétend connaître la Torah mieux que les juifs. À
propos du châtiment applicable au voleur, il déclare : « Le voleur
et la voleuse, à tous deux coupez-leur la main […], mais quiconque
se repent après son tort, D-ieu accepte son repentir » (5, 38/42).
Les juifs contestant ses dires, il les accuse de déformer la
Torah : « Parmi les juifs qui aiment bien écouter le mensonge […],
qui déforment le sens des mots […]. Ils [les juifs] disent [aux
Arabes, auditeurs de Mohammed] : Si vous avez reçu ceci [de D-ieu],
acceptez-le, et si vous ne l’avez pas reçu, soyez méfiants » (5,
41/45).
Cette polémique a pour origine le verset du Pentateuque , qui
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prescrit de trancher la main d’une personne commettant un geste
impudique. À l’inverse des pharisiens, les sadducéens
interprétaient ce verset littéralement. Les pharisiens s’appuient
sur une tradition qui, selon le Talmud, remonte à Moïse. Ce
dernier, instruit par D-ieu, enseigna qu’il ne s’agit pas d’appli-
quer une amputation corporelle, mais un dédommagement d’ordre
financier (Talmud, Baba Kamah 28 A).
La même tradition fut évoquée par les Sages pharisiens à propos
de la loi du talion. Le Pentateuque affirme : « Œil pour œil, dent
pour dent, mains pour mains […] » ; pour les Sages pharisiens, il
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ne s’agit nullement de crever l’œil de l’agresseur, mais de lui
faire payer une somme d’argent, le prix de l’œil (Talmud Baba Kamah
83 B ; Méguilat Taanith 4). L’Évangile n’en tient pas compte et
attribue aux pharisiens un jugement inhumain, alors qu’il est dû
exclusivement aux sadducéens : « Il vous a été dit : Œil pour œil,
dent pour dent. Eh bien, moi je vous dis : Si quelqu’un te frappe
sur la joue droite, tends-lui aussi la joue gauche » (Matthieu 5,
38).
Mohammed semble avoir fait un compromis entre les positions
sadducéenne et pharisienne. La mutilation serait légale, mais si la
victime y consent, un dédommagement financier peut lui être
substitué. Les juifs médinois lui faisant remarquer son erreur,
Mohammed les accuse encore une fois de falsifier les textes :

265 Talmud Kidouchine 82 et Yoma 28 B.
266 Deutéronome 25, 12.
267 Exode 21, 24 ; Lévitique 24, 20 ; Deutéronome 12, 25.



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