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LES LIVRES FONDAMENTAUX DES TROIS MONOTHÉISMES
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eut un maître, et que ce dernier l’initia au judaïsme . Le fait que
le Coran réitère continuellement les expressions : « Dis » ou : « Ré-
ponds » semble le confirmer.
Ce maître que nous allons essayer d’identifier était proba-
blement juif.
Le premier historien de l’islam serait Ibn Ishaq dont les écrits
ont été perdus. On en trouve néanmoins de brèves citations dans le
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livre d’Ibn Hisham . Ce dernier rapporte un récit surprenant :
Au marché, le père de Mohammed, Abdallah, a rencontré une femme,
la sœur d’un érudit biblique se nommant Waraqa Ibn Naufal. Elle lui
fit vainement des avances. La même nuit, Abdallah s’unit à une
autre femme, Amina, et Mohammed fut conçu. Orphelin de père avant
sa naissance, Mohammed est alors confié à une nourrice. Encore
jeune, il s’enfuit pour être recueilli par Waraqa.
On ne peut qu’être étonné de ce récit . Tout en précisant que le
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prophète est Arabe de père et de mère, en relatant l’aventure de la
sœur de Waraqa avec Abdallah, Ibn Ishaq fait peut-être allusion à
une tradition selon laquelle la mère de Mohammed était cette femme,
ce qui expliquerait qu’il ait trouvé refuge chez Waraqa. Ce dernier
serait donc son oncle maternel. Toujours selon Ibn Ishaq, Waraqa
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appelait Mohammed : mon neveu .
Il écrit aussi : « Waraqa appartenait à la religion de Moïse,
avant d’embrasser celle de Jésus, ce qui veut dire qu’il était juif
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et qu’il est devenu nazaréen » . Il relate également que la mère de
Mohammed amenait son fils à l’âge de six ans à Médine pour visiter
ses oncles maternels du clan des Béni al-Najjâr. Il est intéressant
de constater que pendant l’hégire, quand Mohammed arriva à Médine,
il s’installa chez les al-Najjâr. Ce clan figure chez Ibn Ishaq
parmi un des sept clans juifs de la ville ; il cite aussi le nom
d’un de ses membre qui se serait opposé à Mohammed. La sœur de
Waraqa est donc peut-être juive et Mohammed le serait par sa mère.
Le personnage d’Amina a vraisemblablement été introduit par Ibn
Ishaq dans le but de correspondre au dogme de l’islam selon lequel
Mohammed doit être présenté comme un Arabe. De plus, la première
épouse de Mohammed, la pieuse Khadidja, était selon Ibn Ishaq la
cousine de Waraqa, donc peut-être juive elle aussi. Il est légitime
de supposer que le premier maître de Mohammed, celui qui
l’instruisit à La Mecque, fut Waraqa, son oncle maternel, dont il
épousa la cousine. La tradition musulmane raconte que Khadidja fut
la première croyante dans la mission de Mohammed, qu’elle l’aida et
l’encouragea durant la période difficile vécue à La Mecque.
Selon les plus célèbres traditionalistes, Ibn Ishaq, Boukhari,
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Ibn Kathir et Mouslim , Waraqa a rédigé les récits de la Torah et
de l’Évangile en hébreu et en arabe et encouragea Mohammed à
prêcher aux Arabes. Cependant, si nous tenons compte des
48 De nombreuses sourates sont précédées de lettres énigmatiques, A. L. R,.A. L.
M. etc. Il est possible que le scribe juif qui transcrivit le premier Coran ait
repris les locutions Amar Li Rabbi, Amar Li Mori qui signifient : « Mon maître m’a
dit. »
49 Mort deux siècles après Mohammed, en 830.
50 La raison que donne Ibn Ishaq relève probablement d’une légende.
51 Ishaq Ibn, La Vie du Prophète Mahomet, trad. fr. Wahib Atallah, Paris, Fayard,
2003.
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Voir Joseph Azzi, Le Prêtre et le prophète. Aux sources du Coran, Paris,
Maisonneuve et Larose, 2001
e
53 Ils ont vécu au IX siècle, et sont les auteurs principaux des recueils des
hadiths.
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